Sonnet 126: Donc, Ne Laisse Pas La Rude Main..

Donc, ne laisse pas la rude main de l’hiver dĂ©florer en toi ton Ă©tĂ©, avant que tu aies distillĂ© ta sĂ©ve. Verse ton parfum en quelque fiole. ThĂ©saurise en un lieu choisi les trĂ©sors de ta beautĂ©, et ne la laisse pas se suicider. Ce n’est pas une usure dĂ©fendue que l’usance qui fait le bonheur de quiconque lui paie intĂ©rĂȘt. Tu seras heureux de t’acquitter ainsi en crĂ©ant un autre toi-mĂȘme, dix fois plus heureux si tu rends dix pour un ; car dix autres toi-mĂȘme multiplieraient d’autant ton bonheur, si dix enfants te reproduisaient dix fois. Que pourrait donc faire la mort si tu quittais ce monde, en y restant vivant dans ta postĂ©ritĂ© ? Ne sois pas Ă©goĂŻste ; car tu es trop beau pour ĂȘtre la conquĂȘte de la mort et faire des vers tes hĂ©ritiers.