Sonnet 120: Pour Moi, Charmant Ami, Vous Ne..

Pour moi, charmant ami, vous ne pouvez vieillir ; car, tel vous Ă©tiez quand mes yeux rencontrĂšrent les vĂŽtres pour la premiĂšre fois, telle votre beautĂ© m’apparaĂźt encore. Le froid de trois hivers a arrachĂ© aux forĂȘts la parure de trois Ă©tĂ©s ; Trois beaux printemps se sont changĂ©s en jaunes automnes, dans la marche des saisons que j’ai vues ; les parfums de trois avrils ont Ă©tĂ© brĂ»lĂ©s au feu de trois juins, depuis le premier jour oĂč je vous ai vu dans toute la fraĂźcheur de votre jeunesse ; et elle est toujours aussi verte. Ah ! songez pourtant que la beautĂ©, comme l’aiguille du cadran, dĂ©vie furtivement sans qu’on la voie bouger ; ainsi, votre doux Ă©clat, que je me figure immuable, subit un changement sans que mes yeux l’aperçoivent. Sachez donc, pour vous mettre en garde, jeune inexpĂ©rimentĂ©, qu’avant que vous fussiez nĂ©, l’étĂ© de bien des beautĂ©s Ă©tait mort !